Agrégé de l’Université, docteur de 3e cycle en études latines et docteur d’État ès lettres et sciences humaines, professeur de chaire supérieure à la khâgne au lycée Montaigne et au lycée Louis-le-Grand, inspecteur général de l’Éducation nationale, puis doyen de l’IGEN, maire de Périgueux et sénateur de la Dordogne, Xavier Darcos fut plusieurs fois ministre, ambassadeur, élu au fauteuil 40 de l’Académie française, Chancelier de l’Institut français.
Pour la littérature, Xavier Darcos est notamment auteur de nombreuses publications consacrées à la latinité, à la poésie française et à l’histoire littéraire parmi lesquelles Mérimée (2004), Dictionnaire amoureux de la Rome antique (2011) et Ovide, naître, désirer, survivre (2020).
Avec un grand plaisir, le site l’Écrivain des passions publie un coup de cœur pour son dernier livre : Tacite, ses vérités sont les nôtres
Ce que nous dit Xavier Darcos dans la quatrième de couverture
Vers la fin du Ier siècle, l’historien latin Tacite s’interroge sur le destin du monde. Il fait la revue des mœurs collectives et des caractères privés, révèle les calculs et les manœuvres des acteurs politiques, décrit la folie contagieuse, provoquée par la volonté de puissance, tout en se souvenant d’une cause déjà perdue : l’idéal républicain.
Les lettrés, les propriétaires terriens et les militaires désintéressés, qui formaient l’élite romaine, ont cédé la place à des courtisans, à des technocrates, à des nouveaux riches. J’ai pris le parti de considérer que la pensée de Tacite a valeur universelle et qu’il s’adresse encore à notre temps. Certes, il évoque une période cruelle où les princes étaient surtout des tueurs ou des scélérats. Il montre comment le pouvoir peut dégénérer en despotisme de palais, en servilité, en affairisme et en bureaucratie.
Nos manières sont plus policées. Mais ses formules, étincelantes d’intelligence et de pénétration, semblent subitement viser une actualité permanente. Sonnent-elles plus juste à nos oreilles parce qu’elles concernaient une forme de décadence ou de déclin ? Je laisse à chacun le soin d’en juger et de lire entre les lignes.
Extrait de l’Avant-propos : « Les exemples perdurent, plus longtemps que les modes de vie. »
(…) Tacite pense à son propre temps, celui de Trajan et d’Hadrien, et pas seulement au passé qu’il ressuscite. En prolongeant ce constat, nous prenons ici le parti de considérer que Tacite parle pour tous les temps et que son jugement a valeur universelle. Comme le disait Lamartine, Tacite « n’est pas l’historien, mais le résumé du genre humain. (…) Sa sensibilité est plus que de l’émotion, c’est de la pitié ; ses jugements sont plus que de la vengeance, c’est de la justice ; son indignation, c’est plus que de la colère, c’est de la vertu. Certes, il évoque des périodes atroces, où la mort expéditive frappe sans cesse et où les princes sont des sadiques où des scélérats. Nos mœurs sont plus policées. Mais si l’on élargit notre regard contemporain à ce que fut le XXème siècle, – celui de la Shoah, du stalinisme, de Pol Pot et autres exterminateurs, du fondamentalisme, de l’obscurantisme fanatique et du terrorisme – et à la surchauffe (au sens propre et au sens figuré) de la planète entière, Tacite nous aide de sa pertinence. Car notre temps, qui semble imiter les séries télévisées ultra-violentes où ne gagnent que les pires malfaisants, tel Games of Thrones, a de quoi nous écœurer plus sûrement encore que le Ier siècle de notre ère. Et les empereurs romains peuvent se comparer aux maîtres modernes dont le pouvoir a dégénéré en despotisme de palais et en malsaines bureaucraties.
« Peu d’hommes distinguent par leurs lumières ce qui est honnête ou criminel, ce qui sert ou ce qui nuit. Les exemples d’autrui sont écoles du plus grand nombre.
L’humain est éternel et les choses recommencent toujours : en se gardant des anachronismes, on sent cependant que la réflexion de Tacite peut décoder des comportements qui s’observent en tout temps, donc aujourd’hui encore. Au moment où il rédigeait, il tentait d’élucider un passé récent dont il voyait les effets sur son époque. « Son service est plus propre à un état trouble et malade, comme est le nôtre à présent, dit Montaigne. Ses formules semblent souvent dictées par une actualité permanente. Sonnent-elles plus justes à nos oreilles parce qu’elles concernaient originellement une forme de décadence ou de déclin, une marche vers le Bas-Empire ? Je laisse à chacun le soin d’en juger et de lire entre les lignes.
Une fois encore, la tradition latine, résistant à toutes les tentatives d’effacement, nous envoie ses clartés inépuisables, son humanisme et son intelligence de la vie. Car celui qui méprise se méprend. Qu’il lise humblement Tacite, qui nous tend un miroir de vérité, à peine déformant. On aimerait que certains, qui parlent avec flamme (et fumées) et qui s’exposent avec tapage, tout en pensant si peu, en prennent de la graine. (…). XD.
Commentaire de L’écrivain des passions
En compagnie de Tacite, Xavier Darcos nous conduit sur le chemin de la réflexion comparative. Il nous offre un miroir de vérité, dans lequel il nous est permis de comprendre que notre société, comme Rome à la fin du Ier siècle, est « dans un état trouble et malade. » On sent chez le brillant commentateur de Tacite, que déclin et décadence, sont le seuil de toute société évoluée, car « l’humain est éternel et les choses recommencent toujours. »
Tous les princes, toutes les princesses qui nous gouvernent, devraient lire et relire encore ce magnifique livre, car les vérités de Tacite sont aussi les nôtres !
TACITE, SES VÉRITÉS SONT LES NÔTRES, éditions Les belles lettres, collection le goût des idées dirigée par Jean-Claude Zylberstein.